LE SYNDROME D'HERMANSKY-PUDLAK, de l'importance du diagnostic génétique
Par Antoine GLIKSOHN et Maëlle DUPERRAY, membres du Conseil Scientifique de Genespoir, association française des albinismes.
INTRODUCTION L’article ci-dessous est issu d’une présentation faite au cours de la Rencontre Annuelle 2016 de Genespoir. En 2015, Genespoir célébrait ses 20 ans : 20 ans de vie associative, 20 ans de projets en tous genres, 20 ans d’actions pour promouvoir la recherche sur l’albinisme, 20 ans de combat pour améliorer la prise en charge médicale, 20 ans d’échanges entre membres, de communication interne, de contacts avec les médias et 20 ans d’actions pour informer sur l’albinisme. Alors vous nous direz, 20 ans, c’est largement le temps de faire le tour de tous les sujets qui nous concernent. Eh ! bien non ! En 20 ans, il y a un sujet de première importance que nous n’avons jamais développé. Il s’agit d’une forme d’albinisme qui concerne environ 5% des cas d'albinisme et qui est la principale forme dite "syndromique" d’albinisme. Mais cette présentation a justement pour objet de combler ce manque et de vous parler du Syndrome d’Hermansky-Pudlak. Une forme syndromique d’albinisme, c’est avant tout et en tous points une forme d’albinisme. Les personnes qu’elle concerne présentent donc les caractéristiques oculaires et cutanées typiques de l’albinisme. Ces personnes sont albinos. Mais elles présentent aussi d’autres spécificités médicales qui ne touchent ni leur peau ni leurs yeux et qui donc les distinguent des personnes touchées par les formes classiques d’albinisme oculaire ou oculocutané. C’est pour cette raison qu’on parle de forme syndromique d’albinisme. Mais avant de vous présenter en détail les spécificités du syndrome d’Hermansky Pudlak - qu’on appellera par la suite SHP -, commençons par revoir ensemble les caractéristiques communes à toutes les formes d’albinisme, syndromiques et non syndromiques. Et commençons par le commencement : la pigmentation.1 - l'atteinte dermatologique Le mot "albinisme" vient du latin "albus" qui signifie "blanc". Historiquement, l’albinisme c’est donc avant tout un manque partiel ou total de pigmentation. Car en effet, pour des raisons qui varient suivant le type d’albinisme, le pigment qui colore la peau, les yeux et les cheveux, (la mélanine) est absent ou présent en quantité très réduite chez les personnes albinos. La conséquence visible, c’est une apparence singulière, ce que le grand public connaît le mieux. En Afrique, en Asie et chez toutes les ethnies où la pigmentation est d’ordinaire assez foncée, l’hypopigmentation du bébé albinos est remarquée très tôt, dès la naissance. En Europe et particulièrement en Scandinavie, cette hypopigmentation peut au contraire passer relativement inaperçue.
[ Crédit photo Patricia Willocq projet Blanc Ebène ]La mélanine ne sert pas simplement à colorer la peau. Il s’agit avant tout d’une substance qui permet de protéger notre peau contre les rayons UV du soleil. Le manque de mélanine chez les personnes albinos les rend donc plus vulnérables aux rayons ultraviolets ce qui fait qu’elles attrapent des coups de soleil plus rapidement que les personnes normalement pigmentées. Des expositions répétées sans protection peuvent malheureusement conduire à l'apparition de brûlures de la peau, qui avec le temps peuvent conduire à un cancer de la peau. C'est terrible, mais c’est malheureusement quelque chose qui est encore très courant dans les zones tropicales et équatoriales, et notamment chez les albinos africains. Sous nos latitudes européennes, en étant prudent, en limitant les expositions et en utilisant des moyens adaptés de protection solaire (comme des crèmes solaires, des chapeaux, et des vêtements couvrants) on n’a pas de risque de brûler ni de développer des cancers de la peau.Cette hypopigmentation, ce manque de mélanine peut en fait varier de façon très importante d’une personne albinos à une autre et dans certains cas d’albinisme, la pigmentation est même en apparence tout à fait normale. Et pourtant, on peut être albinos tout en ayant une peau et des cheveux en apparence normalement pigmentés. Car contrairement à ce le grand public pense, la principale caractéristique de l’albinisme, ça n’est pas le manque de pigmentation. En effet, le point commun, la caractéristique que toutes les personnes albinos partagent sans exception, ce sont les problèmes oculaires, les problèmes de vue.2 - l'atteinte oculaire Chez toutes les personnes albinos, on constate un ensemble d’anomalies oculaires qui sont spécifiques à l’albinisme.Il y a d’abord l’hypopigmentation de l’iris. Là encore, c’est une histoire de mélanine. Suivant les personnes, en cas d’albinisme, la couleur de l’iris va varier entre le bleu, le gris, le violet, le rose pâle. Mais on peut également rencontrer des personnes albinos avec des yeux verts, voire marron. Là encore, tout dépend de la personne, de son type d’albinisme, de ses origines ethniques et peut-être encore d’autres facteurs. Le manque de pigmentation joue donc sur la couleur de l’iris, mais il a surtout pour conséquence le fait que l’iris ne joue pas correctement le rôle de filtre qu’il est censé jouer. Chez les personnes albinos, quelle que soit la couleur des yeux, il y a une certaine quantité de lumière extérieure qui pénètre dans l’œil à travers l’iris, en plus de la lumière qui entre normalement par la pupille. Ce surplus de lumière provoque un certain éblouissement. Dans le monde médical, ce phénomène est appelé la "photophobie". Mais derrière l’iris de la personne albinos se cachent d’autres anomalies oculaires bien plus lourdes de conséquence. Il s’agit tout d’abord de défauts au niveau de la rétine. La rétine, c’est la partie de l’œil qui capte la lumière et la transforme en information nerveuse envoyée au cerveau via les nerfs optiques. La rétine est faite d’une superposition de cinq couches cellulaires. La couche la plus profonde est une couche de pigmentation, appelé epithélium pigmentaire, qui vient protéger la rétine des UV du soleil et rend la surface extérieure de l’œil parfaitement opaque à la lumière. Chez les personnes albinos, on constate un manque partiel ou total de pigmentation au niveau de cet épithélium. Ceci a deux conséquences. Premièrement, la rétine est moins bien protégée contre les UV. Pour éviter toute brûlure lorsque nous nous trouvons dans un environnement très lumineux, nous devons donc porter des lunettes de soleil filtrant parfaitement les UV. Et par ailleurs, l’œil n’est pas parfaitement opaque. De la lumière parasite peut donc y pénétrer, ce qui est une autre cause de la photophobie.
De manière générale, la rétine des personnes albinos ne se développe pas correctement. Outre le manque de pigmentation que l’on vient d’évoquer, on constate que la quantité de cellules photoréceptrices présentes dans la rétine albinos a tendance à être moins importante que la normale. Ces cellules, ce sont elles qui captent la lumière et la transforment en information nerveuse pour qu’elle soit ensuite transmise au cerveau. S’il y a moins de photorécepteurs, l’information, l’image perçue est moins précise. Par ailleurs, chez l’Homme, au centre de la rétine, dans l’axe de la pupille, se trouve une zone où la quantité de photorécepteurs est maximale. Il s’agit de la macula. Cette macula contient en son centre une petite dépression, la fovéa, qui est entièrement composée de cônes (de photorécepteurs) serrés les uns contre les autres. Il s’agit de la zone d’acuité maximale de l’œil, c’est-à- dire celle qui donne la vision la plus précise. Or chez les personnes albinos, cette zone de la rétine ne se développe pas correctement. Suivant les personnes, elle est soit totalement absente, soit partiellement présente. Cette anomalie est appelée par les médecins l’hypoplasie fovéale. Et là encore, qui dit moins de photorécepteurs dit malheureusement moins bonne acuité visuelle.
Mais nous n’avons pas encore fait le tour des anomalies oculaires. Sans entrer dans les détails, chez toutes les personnes albinos, on constate également des anomalies au niveau des nerfs optique : en particulier, ces nerfs qui relient les rétines au cerveau ne se croisent pas correctement ce qui engendre des défauts plus ou moins importants de la vision en relief. On constate également chez les personnes albinos ce qu’on appelle un nystagmus. Il s’agit d’une succession de mouvements involontaires et saccadés des yeux, le plus souvent horizontalement. Ce nystagmus, qui apparaît pendant les premiers mois de la vie, serait une conséquence des anomalies de l’œil et du nerf optique qui empêchent une maturation normale de la fonction visuelle. De nombreuses personnes albinos présentent également un strabisme. Il s’agit d’un défaut de convergence des yeux. Les deux yeux ne regardent pas toujours exactement dans la même direction ce qui altère la vision binoculaire (la vision en relief) et donne un regard singulier. Enfin on constate quasi systématiquement chez les personnes albinos des défauts bien plus courants dans la population, des amétropies, que sont l’astigmatisme, la myopie ou l’hypermétropie. Ce sont les seuls défauts que l’on sait vraiment corriger avec des lunettes ou des lentilles. Tout cet ensemble d’anomalies sont la cause d’une acuité visuelle faible voire très faible. De loin, on mesure suivant les personnes une acuité visuelle corrigée allant au mieux de 3 à 5/10ème dans les meilleurs des cas à 1/20ème voire 1/50ème dans les cas les plus sévères. Toutes ces anomalies visuelles sont présentes de façon plus ou moins importante chez toutes les personnes albinos et constituent le point commun de toutes les formes d'albinisme. En France et en Europe, le plus souvent, c’est donc à l’issue d’un examen ophtalmologique qu’un premier diagnostic d’albinisme est posé. On parle alors de diagnostic "clinique". Dans de nombreux cas, ce diagnostic est posé avec beaucoup d’assurance par le médecin car le bébé présente de façon suffisamment prononcée les caractéristiques oculaires, voire oculaires et cutanées typiques de l’albinisme. Mais il arrive aussi relativement souvent que le médecin ne soit pas complètement catégorique, soit parce que les anomalies qu’il a constatées chez son bébé patient ne sont pas très prononcées, soit parce qu’il n’a pas eu la possibilité de faire tous les examens nécessaires, ou encore parce que sa connaissance de l’albinisme n’est pas très bonne. Dans tous les cas, le médecin doit proposer de réaliser un diagnostic génétique.3 – le diagnostic génétique Il y a lieu de faire un diagnostic génétique, parce que l’albinisme est une condition génétique. C’est-à-dire que toutes les anomalies dues à l’albinisme, quelle que soit la personne et quel que soit le type d’albinisme, ont pour origine le dysfonctionnement d’un gène.Ces trente dernières années, la connaissance des origines génétiques de l’albinisme a particulièrement progressé. Aujourd’hui, les chercheurs ont réussi à identifier pas moins de 19 gènes qui, lorsqu’ils sont mutés, conduisent à une forme d’albinisme.Comme tous les gènes contenus dans notre ADN, chacun de ces 19 gènes joue un rôle différent dans le développement et le fonctionnement du corps humain. Pour la majorité d’entre eux, ce rôle n’est pas encore clairement compris. Mais en s’appuyant sur les observations cliniques, les médecins ont pu associer à chacun de ces 19 gènes un type d’albinisme. Concrètement, on a constaté que le dysfonctionnement des gènes TYR, OCA2, TYRP1, SLC45A2, SLC24A5 et C10orf11 conduit systématiquement aux anomalies oculaires spécifiques de l’albinisme mais aussi, dans la majorité des cas, à un manque de pigmentation au niveau de la peau et des cheveux. C’est pourquoi on a décidé de classer ces gènes sous la catégorie albinisme oculo-cutané. Néanmoins, il est important de bien avoir en tête le fait que chez certaines personnes ayant l’un de ces gènes muté, l’atteinte cutanée peut ne pas être visible. Pour ce qui est du gène GRP143, en cas de dysfonctionnement, ce ne sont que des anomalies oculaires qui sont constatées. Pour ce gène, on parle donc d’albinisme oculaire pur. On trouve également le syndrome FHONDA causé par des mutations du gène SLC38A8. Disons qu’il s’agit d’une pathologie très proche de l’albinisme oculaire mais sans aucun défaut de pigmentation, même au niveau de l’iris et de la rétine. De par cette similitude, une majorité de chercheurs s'accorde à classer cette condition génétique dans la catégorie "albinisme oculaire".Enfin, pour les autres gènes, lorsqu’il y a dysfonctionnement, on constate non seulement des anomalies oculaires et parfois cutanées mais également d’autres anomalies qui en apparence n’ont rien à voir avec les premières mêmes si elles y sont en fait bien liées. Ce sont les formes dites syndromiques d’albinisme dont nous parlions en introduction.
La première forme de ce type a été mise en évidence en Tchécoslovaquie en 1958 par les docteurs Hermansky et Pudlak. Deux de leurs patients atteints d’albinisme oculocutané présentaient des problèmes de coagulation et des troubles pulmonaires qui, après analyse, s’avéraient avoir la même origine que les dysfonctionnements cutanés et oculaires. C’est ainsi qu’était décrit pour la première fois le syndrome d’HermanskyPudlak. Ces vingt dernières années, 10 gènes ont été identifiés comme pouvant, en cas de dysfonctionnement, conduire à ce syndrome. Et puis il convient de signaler également, le Syndrome de Chediak-Higashi, qui est une autre forme syndromique d’albinisme et pour lequel un seul gène a été identifié à ce jour. En France, à Bordeaux, précisément, nous avons la chance d’avoir un laboratoire de génétique parmi les meilleurs au monde pour le diagnostic de l’albinisme. Tous les gènes mentionnés ici y sont aujourd’hui testés de manière systématique à chaque demande de diagnostic. Depuis une petite dizaine d’année, ce ne sont pas moins de 800 demandes de diagnostic qui ont été reçues par ce laboratoire. Le pourcentage de patients pour chaque type d’albinisme est indiqué dans le graphique de la page suivante. Sur 577 patients, dans presque 30% des cas le diagnostic n’a pas abouti car une seule, voire aucune mutation n’a été trouvée. Par ailleurs, on constate que parmi les 71% obtenant un diagnostic, 4% sont atteints d’un Syndrome d’Hermansly-Pudlak. Cette forme d’albinisme qui peut, comme on l’a vu, être causée par au moins 10 gènes différents, a pour conséquence, non seulement les défauts dermatologiques et oculaires de l’albinisme décrits précédemment, mais également d’autres dysfonctionnements.4 – Défauts plaquettaires propres au SHP La caractéristique principale du SHP, c'est- à-dire le point commun entre tous les types de SHP, c’est un dysfonctionnement sanguin et plus précisément une anomalie au niveau des plaquettes sanguines. Dans le sang on retrouve principalement trois types de cellules : les globules rouges qui transportent l’oxygène, les globules blancs qui participent aux défenses immunitaires et enfin les plaquettes qui sont chargées d’empêcher les saignements en faisant notamment coaguler le sang. Les plaquettes, au microscope électronique, ont un aspect clair avec à l’intérieur des points foncés, opaques : ce sont les granules denses. Ces granules sont comme des sacs dont le contenu joue un rôle dans la coagulation du sang. Il y a normalement une dizaine de granules denses par plaquette, mais chez les personnes touchées par le SHP, il n’y en a aucune. Les plaquettes fonctionnent donc mal et ne remplissent pas totalement leur rôle. Pour bien comprendre le rôle des plaquettes et ce qui fonctionne mal pour les personnes touchées par le SHP, prenons l’exemple d’une personne lambda qui se coupe en faisant la cuisine. Lors de la coupure, des vaisseaux sanguins sont endommagés et le sang s’en échappe. Dit plus simplement, on saigne. Afin d’éviter de perdre trop de sang, l’organisme doit rapidement arrêter l’hémorragie et c’est là que les plaquettes entrent en jeu.Tout d’abord, les plaquettes vont physiquement empêcher le saignement. Pour cela, elles vont s’accoler au niveau de la coupure et former un réseau cellulaire au niveau de la plaie qui va bloquer la sortie du sang. Les plaquettes vont ensuite libérer le contenu de leurs granules denses dans le sang. Le contenu de ces granules va permettre d’attirer de nouvelles plaquettes, agrandissant et fortifiant ainsi le réseau. Enfin, les plaquettes en réseau libèrent d’autres molécules, cette fois non contenues dans les granules denses, qui vont faire passer localement le sang de liquide à solide : c’est la coagulation sanguine, qui permet normalement d’arrêter complètement l’hémorragie par la formation d’un caillot. Plus il y a de plaquettes à l’endroit de la coupure et plus la coagulation est rapide et efficace. Les plaquettes SHP sans granules denses ne peuvent pas attirer de nouvelles plaquettes, ce qui provoque une coagulation plus lente et donc une tendance aux saignements ; la plaie met plus longtemps à se refermer mais elle se ferme correctement. Cette tendance à saigner plus longtemps que la normale, phénomène très variable selon les personnes SHP, est l’une des conséquences du défaut plaquettaire. Une autre conséquence est qu’en général, les personnes avec SHP font assez facilement des hématomes, qu’on appelle plus communément des bleus et qui sont en fait le résultat d’un saignement interne, faisant suite à un choc. Chez les personnes SHP, des hématomes peuvent apparaître même lors de chocs anodins, c’est pourquoi ce phénomène peut être plus marqué chez l’enfant, qui se cogne plus souvent que l’adulte. Pendant l’enfance, il peut y avoir également des épisodes hémorragiques comme des saignements du nez ou des gencives. Ces phénomènes ont toutefois tendance à diminuer après l’adolescence. Il est important de retenir que, dans certains cas de SHP, aucune manifestation particulière pouvant laisser penser à un trouble de la coagulation n’est constatée, ce qui peut compromettre un bon diagnostic.
Toutes ces conséquences, sauf dans des cas extrêmes, n’ont à priori rien de grave dans la vie de tous les jours mais il peut néanmoins se produire d’importantes complications hémorragiques à cause de certains facteurs de risque. Tout d’abord, Les grandes étapes aboutissant à la coagulation du sang suite à une coupure par exemple mai 2016 10 ces complications peuvent survenir dans des situations particulière telles qu’une chirurgie, des dents notamment, ou lors d’un accouchement. Les hémorragies peuvent toutefois être évitées par des traitements au préalable. De plus, certains médicaments sont à proscrire absolument. Par exemple, l’aspirine ou dérivés, qui empêchent les plaquettes de s’agréger entre elles, ce qui peut entraîner de graves hémorragies chez les personnes SHP. Il existe en fait une liste assez conséquente de médicaments à risque pour les personnes SHP, liste dans laquelle on trouve en particulier les anti-inflammatoires non stéroïdiens.A cause de ces risques notamment, chez toute personne albinos qui ne connait pas son diagnostic génétique, la moindre manifestation hémorragique anormale doit amener à envisager la possibilité d’un SHP. Cette anomalie au niveau des plaquettes sanguine est commune aux dix formes connues de SHP, mais dans la majorité des cas de SHP, il ne s’agit pas de la seule conséquence. Voyons donc maintenant quelles sont les autres atteintes possibles du SHP.5 – autres atteintes possibles dans le SHPUne autre atteinte possible du SHP c’est une inflammation chronique intestinale, qu’on appelle aussi colite, et qui concerne environ 15 à 20 % des patients, tous types de SHP confondus. Ce problème équivaut à la maladie de Crohn, avec des caractéristiques similaires mais aussi une très grande variabilité de manifestations en fonction des personnes. Il se déclare en général à l’adolescence avec des symptômes plus ou moins épisodiques et plus ou moins intenses. Il s’agit entre autres de douleurs et de crampes abdominales, de diarrhées chroniques, qui s’accompagnent parfois de déshydratation. Il peut se produire également des vomissements ainsi qu’une perte de sang dans les selles, accentuée par les problèmes hémorragiques dont nous avons parlé. L’inflammation chronique de l’intestin peut provoquer des ulcérations – ou fissures de l’intestin – qui sont visibles par coloscopie. Elle touche en général le colon distal (c’est- à-dire la partie descendante du gros intestin) mais elle peut aussi remonter dans tout le système digestif dans les cas les plus graves.Comme pour la maladie de Crohn, lorsque l’atteinte est importante, il existe des traitements anti-inflammatoires souvent lourds mais qui peuvent atténuer la douleur et l’inflammation. Ces traitements ne sont cependant pas toujours très efficaces car ils traitent les conséquences (c’est à dire l’inflammation) et non les causes.En réalité, les causes exactes ne sont pas connues. L’hypothèse la plus répandue actuellement, c’est que l’inflammation serait provoquée par le dépôt dans les cellules de l’intestin d’une substance appelée lipofuscine. Chez l’être humain, cette substance s’accumule normalement dans les cellules de façon progressive au cours de la vie. Mais chez tous les patients SHP, on la retrouve en quantité très importante et de manière très précoce.Puisque seuls 15% des SHP développent cette pathologie, d’autres facteurs inconnus entrent certainement en jeu et il est donc impossible de prédire à l’avance quelles personnes ayant un SHP seront touchées et dans quelle mesure.Certains patients SHP peuvent développer une autre complication bien plus grave encore que l’inflammation intestinale. Il s’agit d’une atteinte pulmonaire qui évolue en une fibrose des poumons.Cette atteinte concerne les patients avec le syndrome de type 1, 2 et 4. Elle n’a pour le moment jamais été décrite dans les autres types. Il s’agit d’un "durcissement" progressif des poumons qui empêche petit à petit ces derniers de s’étendre et de se contracter pendant la respiration. Ce phénomène pourrait lui-aussi s’expliquer par une accumulation de lipofuscine au niveau des cellules pulmonaires. Mais là encore, les mécanismes exacts ne sont pas connus.Le moment où apparaît ce phénomène et sa vitesse d’évolution varient grandement d’un individu à l’autre. Mais en général, c’est entre 30 et 40 ans que les premiers troubles respiratoires se déclarent. Chez les personnes sans prise en charge médicale, l’issue est malheureusement fatale dans les années qui suivent l’apparition des premiers symptômes respiratoires.Plus le patient est pris en charge rapidement et plus l’évolution de la fibrose peut être ralentie. Il n’y a aujourd’hui pas de remède miracle mais il est possible de ralentir le phénomène. Tout d’abord, différentes recommandations existent pour préserver la fonction pulmonaire : il faut bien sûr éviter de fumer, il faut aussi se protéger le mieux possible des infections, et faire de l’exercice pour travailler le souffle et l’endurance. Il faut savoir également qu’il existe un médicament, la Pirfenidone, qui est actuellement sur le marché pour les fibroses pulmonaires idiopathiques c'est-à-dire dont l’origine est inconnue, non liée à une maladie. Chaque médicament a une autorisation de mise sur le marché pour une indication thérapeutique particulière. La Pirfénidone n’a pas d’autorisation pour la fibrose pulmonaire du SHP puisque cette dernière n’est pas idiopathique. Mais puisque fondamentalement on ignore encore les causes exactes de la fibrose pulmonaire des personnes touchées par le SHP, il est parfois possible de s’en faire prescrire. Cette molécule semble être efficace chez les personnes SHP qui en prennent et il y a actuellement des essais cliniques spécifiques aux patients avec SHP qui montrent un ralentissement de l’évolution de la fibrose et qui pourraient donc aboutir à une autorisation spécifique de ce médicament pour le SHP. Plus la fibrose progresse et plus les symptômes s’aggravent ; difficulté à respirer, fatigue et mauvaise oxygénation qui peut conduire à des dommages de certains organes comme le cœur. Pour pallier l’insuffisance respiratoire, une oxygénothérapie peut être envisagée mais ensuite la greffe de poumon, lorsqu’elle est possible, devient la seule solution pour éviter un décès qui survient chez les patients en général entre 40 et 60 ans. Il est donc extrêmement important que les personnes avec un SHP 1, 2 ou 4, grandement susceptibles de développer cette complication, réalisent des études fonctionnelles des poumons à l’âge jeune adulte et suivent ensuite la progression de leur capacité pulmonaire par des examens adaptés. Vous aurez donc compris que les symptômes propres au SHP sont multiples et qu’ils ne se manifestent pas chez tous les patients. Leur apparition va en fait dépendre du gène responsable, des mutations en cause et certainement d’autres facteurs inconnus.6 – récapitulatif En fait, chaque personne va développer le SHP d’une manière différente. Toutes les personnes SHP ont un albinisme et un défaut des plaquettes mais avec une importante hétérogénéité. Le degré de pigmentation est très variable entre les personnes d’un même type de SHP et il en est de même pour les atteintes plaquettaires, qui peuvent conduire à des symptômes extrêmes ou au contraire passer inaperçues. Environ 15 à 20% des personnes vont développer une inflammation intestinale, d’intensité très variable elle aussi. Dans quelques cas de SHP, les reins sont aussi touchés par des problèmes de fonctionnement. Les troubles pulmonaires,eux, ne concernent que les types 1 et 4 et quelques cas du type 2. Une autre spécificité du type 2 est une neutropénie c'est-à-dire une quantité plus faible de globules blancs dans le sang qui peut provoquer des infections récurrente chez le patient.Il est donc vital pour une personne albinos de savoir si elle est atteinte ou non d’un SHP et de quel type, afin de pouvoir bénéficier de la meilleure prise en charge possible. Aujourd’hui, seul le diagnostic moléculaire permet de distinguer avec certitudes les différents types de SHP les uns des autres.7 – syndrome de Chediak HigashiSe limiter au SHP pour parler des formes syndromiques d’albinisme serait faire une impasse. En effet, vous vous souvenez certainement que dans les 19 gènes actuellement connus comme responsables d’une forme d’albinisme il y a le gène LYST. Et ce gène est responsable d’une autre forme syndromique d’albinisme beaucoup plus rare que le SHP et qui s’appelle le Syndrome de Chediak-Higashi. Les personnes qui sont touchées par cette pathologie ont, comme dans le cas du SHP, un albinisme et un dysfonctionnement des plaquettes sanguines. En plus de ces troubles, il y a aussi des atteintes neurologiques et une déficience immunitaire grave. Les patients souffrent donc de fréquentes infections. S’ils ne reçoivent pas une greffe de moelle osseuse, ils meurent pendant l’enfance. Heureusement, ce syndrome est vraiment très rare et certains enfants qui ont reçus une greffe vivent normalement, ou en tout cas comme toute personne atteinte d’une forme classique d’albinisme.8 – le HPS Network Le HPS Network ou Réseau Hermansky Pudlak (www.hpsnetwork.org), est une association créée aux États-Unis en 1995. Elle regroupe des familles
américaines et des familles vivant aux quatre coins du monde, toutes touchées par le SHP ou par le syndrome de Chediak-Higashi. C’est une vraie référence mondiale pour les formes syndromiques d’albinisme. Elle apporte son soutien aux familles, et œuvre pour une meilleure connaissance et prise en charge de ces syndromes. Le HPS Network soutient également plusieurs projets de recherche qui visent à mieux comprendre les causes des atteintes pulmonaires et intestinales mais aussi à développer de nouvelles thérapies. Depuis début 2015, Genespoir est en contact direct avec le HPS Network. Il s’agit vraiment pour notre association d’un partenaire de première importante sur lequel nous pouvons compter pour nous assister dans l’accompagnement des patients et des familles qui, en France, sont touchés par les formes syndromiques d'albinisme.
ConclusionPour conclure, revenons sur les quatre points qu’il nous semble absolument fondamental de retenir :
- Les formes syndromiques d’albinisme ne sont pas si rares qu’on a pu le dire jusqu’à présent. En France elles concernent environ 1 personne albinos sur 20.
- Seul le diagnostic génétique permet d’identifier avec certitude la forme d’albinisme d’un patient. Il est impossible d’annoncer sans risque d’erreur un type d’albinisme sur la base d’un diagnostic clinique.
- Les symptômes d’une forme syndromique d’albinisme peuvent être imperceptibles pendant de longues années. Et lorsqu’ils sont perceptibles, le lien avec l’albinisme ne s’impose pas toujours comme une évidence.
- Plus une forme syndromique est diagnostiquée tôt, meilleure est la prise en charge médicale.
Albinisme : quel traitement pour le nystagmus ?
Conférence du Docteur Alain SPIELMANN lors de la rencontre annuelle 2014 de Genespoir.
Le...
Estime de soi et thérapies comportementales
Intervention de Béatrice de Reviers lors de la rencontre 2017 de Genespoir à Dijon.Béatrice de...
La vision : du jeune enfant aux grands parents
Exposé du Professeur François VITAL-DURAND lors de la Rencontre Annuelle 2017 de Genespoir à...
Albinisme : GENESPOIR fait avancer la recherche
L'association Genespoir a participé dimanche 23 juin à la Course des Héros, au Bois de Boulogne,...
Un diagnostic pour tous
Madame, Monsieur,L’Alliance Maladies Rares, collectif de plus de 218 associations de malades et...
RQTH : simplification pour les personnes handicapées et les MDPH
Le décret n° 2018-850 du 5 octobre 2018 relatif à la simplification de la procédure de...